Message de carême, en ce temps de crise sanitaire
Jean-Pierre Delville, évêque de Liège
Chers Frères et Sœurs,
« Veilleur, où en est la nuit ?
Veilleur, où donc en est la nuit ? » Telle est la voix
que le prophète Isaïe a entendue autrefois, en période de détresse
(Is 21,11-17). Elle retentit aussi à nos oreilles. Combien de temps
notre crise sanitaire va-t-elle durer ? Nous venons tous les
jours aux nouvelles. Comme au temps d’Isaïe : « Le
veilleur répond : ‘Le matin vient, et puis encore la nuit…
Si vous voulez des nouvelles, interrogez, revenez’. » Alors
le prophète invite à la solidarité : « Allez à la
rencontre de l’assoiffé, portez-lui de l’eau, accueillez le
fugitif avec du pain ». Et il prophétise la victoire sur
l’ennemi : il ouvre la voie à l’espérance.
Nous aussi nous vivons une nuit, malgré le beau soleil du printemps.
Le raz-de-marée mondial de l’épidémie de Coronavirus envahit
notre quotidien et nos médias. Que reste-t-il de notre vie et de nos
projets ? Que faisons-nous de nos journées, seuls ou en
famille ? Comment nous organiser à nouveaux frais, face aux
difficultés de déplacement et face au chômage professionnel ?
Comment vivre la Semaine Sainte et le temps pascal dans ces
circonstances ?
La peur de l’ennemi invisible
D’abord, on est frappé par la peur : la
peur pour soi-même et sa santé ; la peur pour les autres et
pour nos proches ; puis la peur des autres, qui pourraient nous
contaminer ; et la peur pour notre avenir dans cette situation
de paralysie sociale. Chacun est frappé d’une façon ou d’une
autre : dans son travail, dans sa maison, dans sa santé, dans
son moral, dans ses relations. Le virus est arrivé, c’est un
ennemi invisible et nous cherchons à nous protéger. Nous
sommes plus isolés que d’habitude et devons nous débrouiller pour
beaucoup de choses ; nous devons aussi prendre des décisions,
nous devons nous organiser, nous devons nous donner des consignes
pour changer notre style de vie. On dirait que l’histoire s’est
arrêtée et qu’il n’y a plus qu’une seule info sur les
médias : le coronavirus. Les projets sont mis en veilleuse et
rangés au fond des tiroirs. Les rendez-vous qui scandaient le cours
du temps sont supprimés, les réunions sont reportées. Le risque
est alors de nous replier sur nous-mêmes et sur nos problèmes, sur
notre santé et sur nos proches.
Le besoin de solidarité
Pourtant, si le coronavirus nous a appris une
chose, c’est à nous rapprocher affectivement les uns des autres.
En étant séparés physiquement, nous découvrons que nous sommes
appelés à être proches humainement. Nous découvrons de nouveaux
moyens techniques pour nous contacter. Nous sommes dans l’action de
grâces et l’admiration pour nos soignants et nos gouvernants. Nous
ressentons mieux la nécessité du rapport écologique à la
création. Nous nous sentons plus proches de tous ceux qui souffrent
dans le monde. Nous découvrons notre destin commun. Jamais plus, le
monde ne sera comme avant. Il devra être plus solidaire.
Une deuxième chose que nous avons découverte,
c’est notre fragilité : il suffit d’un petit virus pour que
toute la société soit arrêtée et se trouve en grave crise
économique et sociale. Tous sont touchés, du plus pauvre au plus
puissant. Subitement, les scènes de détresse ne sont plus l’apanage
des pays pauvres, mais aussi des pays riches. Cette crise nous pousse
à redécouvrir nos vraies valeurs : le sens de la relation
sociale, le sens de la sobriété, le sens de la spiritualité et de
la foi.
Jésus face à la mort de
son ami Lazare
Dans l’évangile de ce 5e
dimanche de carême, 29 mars 2020, nous découvrons Jésus qui pleure
près de son ami Lazare, décédé inopinément (Jn 11,1-45). Jésus
encaisse la souffrance due à la mort de son ami et à la tristesse
de ses sœurs. Cela nous fait penser à ceux qui sont décédés
récemment, du coronavirus ou d’une autre affection. Nous les
portons dans notre cœur, à commencer par l’abbé Lech Walaszczik,
curé de Chênée-Angleur-Vennes, décédé d’un infarctus, qui
était aimé de tous. C’est après avoir traversé cette épreuve
de confrontation à la mort que Jésus rendra la vie à Lazare. La
résurrection a nécessité une incubation. Ainsi la souffrance due
au coronavirus est-elle pour nous un temps d’incubation
spirituelle, un temps de recueillement, qui nous donnera des énergies
vitales pour construire le futur. Il nous concentre sur notre propre
énergie spirituelle pour que celle-ci nous permette de réagir, de
survivre et de nous engager de manière renouvelée. Ainsi nous
vivrons notre Pâques comme une vraie mort à nous-mêmes et à notre
orgueil, pour recevoir du Christ la vie véritable, qui a une valeur
éternelle.
S’engager pour les pauvres
N’oublions pas ceux qui
souffrent plus que nous, en particulier ceux d’Haïti, à qui nous
consacrons notre carême de partage !
Entraide et Fraternité, l’ONG de solidarité de l’Église
catholique, a centré son attention sur la situation en Haïti. Cette
île très pauvre, frappée par un terrible tremblement de terre il y
a dix ans, n’a pas encore pu être reconstruite ; sa
cathédrale à moitié détruite est devenue un symbole de pauvreté,
mais aussi de foi ! Des groupements dynamiques relancent
l’agriculture dans le respect de la nature et de l’écologie. Ce
sont des associations porteuses d’avenir que nous voulons aider
durant ce carême de partage. Pour un euro que vous donnerez, la
population locale en recevra cinq via le projet qui a été reconnu
par les autorités belges. Donc, ne négligez pas la collecte du
carême de partage, le
dimanche des Rameaux : faites un don par virement bancaire au
compte BE68 0000 0000 3434 d’Entraide et Fraternité, 32 rue du
Gouvernement Provisoire, 1000 Bruxelles, avec la mention « 6573
Carême de partage » ou sur le site internet
www.entraide.be/don.
Consignes de prière
Ce vendredi
27 mars à
18 h, le pape François
nous convie à une prière œcuménique en mondovision !
Associez-vous à cette prière par votre TV et vos autre médias.
Dès ce samedi
28 mars,
vous trouverez sur le site du vicariat Annoncer l’évangile
(https://annoncerlevangile.be),
trois propositions de prière
à domicile
pour les jeudi
saint, vendredi saint et samedi saint,
dans une version avec enfants et dans une version pour adultes seuls.
Diffusez-les et utilisez-les !
Pendant les jours de la
Semaine
Sainte,
les églises demeurées ouvertes peuvent être décorées
d’une façon qui évoque la liturgie du jour, avec des fleurs, des
textes et des objets symboliques.
Dimanche des Rameaux
et de passion,
5 avril,
conformément au document de la Conférence épiscopale envoyé ce
lundi 23 mars à 16.46 h. par e-mail, il faut éviter toute
célébration publique. Mais les rameaux cueillis par les fidèles et
apportés dans leurs maisons seront considérés comme bénis, par
association spirituelle aux offices célébrés en privé et diffusés
par les médias. Les rameaux bénis par les prêtres dans les
célébrations privées ne pourront être disponibles qu’après le
confinement.
La messe chrismale
prévue pour le 8 avril est reportée à une date ultérieure.
N’oubliez pas de vous
associer aux applaudissements
des gens en remerciement au personnel soignant tous les soirs à 20
h. Les cloches
des églises peuvent sonner à ce moment, c’est encourageant pour
tous.
Les mariages
reportés à date ultérieure pourront être programmés mêmes les
dimanches et jours de fête, à titre exceptionnel.
Les funérailles
doivent se dérouler en plein air, même dans des endroits différents
des cimetières, mais avec quinze personnes maximum et en tenant les
distances voulues.
Vu ces circonstances et en concertation avec
les autres diocèses wallons, je vous prie de ne
plus demander d’offrande de casuel à l’occasion de funérailles.
Les fidèles sont évidemment libres de faire spontanément un don,
qui dans ce cas reviendra à l’ASBL d’Unité Pastorale, ou, à
son défaut, à la caisse d’UP, moyennant le défraiement de frais
éventuels.
Concernant la transmission des comptes
de Conseil de fabrique, ceux-ci
peuvent être envoyés au Vicariat du temporel (Service des
fabriques d’église) par la poste, soit être déposés à
l’accueil du bâtiment « Espace Prémontrés » (40,
rue des Prémontrés). Si aucune de ces deux voies n’est possible,
pour des raison de santé, de sécurité, ou de confinement, un
fabricien peut envoyer un mail au Vicaire épiscopal
(e.debeukelaer@catho.be)
expliquant cela. Dans ce cas, l’étude des comptes attendra le
moment propice.
La diffusion des offices
liturgiques par les moyens de communications divers est valorisée et
conseillée (RCF, YouTube, Facebook, KTO, etc.). RCF
(sur FM 93.8) diffuse en semaine la célébration de la messe à 19
h. Celle du vendredi est une célébration œcuménique.
Celle du vendredi 3 avril sera interreligieuse
et sera assurée par le rabbin
Joshuah
Nejman,
l’iman Franck Hensch
et moi-même. Le
samedi à 17 h. a lieu l’eucharistie dominicale.
Le message d’espérance
« Écoutez
la voix des guetteurs : ils élèvent la voix, tous ensemble ils
crient de joie car, de leurs propres yeux, ils voient le Seigneur qui
revient à Sion » (Is 52,8).
Le mal n’aura pas le dernier mot, la peur ne
triomphera pas, l’amour l’emportera. Comme nous le disons à
chaque eucharistie :
Délivre-nous
de tout mal, Seigneur,
et
donne la paix à notre temps ;
par
ta miséricorde, libère-nous du péché,
rassure-nous
devant les épreuves
en
cette vie où nous espérons
le
bonheur que tu promets
et
l’avènement de Jésus Christ,
notre
Sauveur.
Bonne
fin de carême à tous !
Liège, 26 mars 2020
Jean-Pierre Delville, évêque de Liège